Extrait: ... en 1814. Descendue chez Serni, place d'Espagne, Mme Récamier, avant de s'établir dans son appartement, voulut prendre possession de la ville éternelle en visitant immédiatement Saint-Pierre et le Colisée. Rome était veuve de son pontife, et cette capitale du monde chrétien n'était alors que le chef-lieu du département du Tibre. M. de Tournon, absent lors de l'arrivée de Mme Récamier, en était préfet; M. de Norvins était chargé de la police, et le général Miollis commandait les troupes françaises.-La douleur de la captivité du pape était générale et profonde dans la population romaine; l'aversion pour la domination française perçait en toute occasion et animait au même degré le peuple et l'aristocratie. Au milieu des circonstances si graves qui agitaient l'Europe, le nombre des étrangers était presque nul dans cette ville qui a le privilège d'attirer à elle les pèlerins et les curieux de l'univers entier. Ce deuil et cette tristesse donnaient encore peut-être quelque chose de plus saisissant à l'aspect de Rome. Mme Récamier avait une lettre de crédit et de recommandation pour le vieux Torlonia, lequel était depuis longtemps en rapport d'affaires avec M. Récamier; il mit un extrême empressement à lui offrir ses services et à lui présenter sa femme. Ce Torlonia, banquier le matin et dans son comptoir, duc de Bracciano le soir et dans son salon, qui a fait de ses fils des princes, et des grandes dames de toutes ses filles, était un personnage singulier. Doué d'une remarquable intelligence en affaires, avare comme un juif et somptueux comme le plus magnifique grand seigneur, il faisait, cette année-là même, arranger et meubler son beau palais du Corso; Canova exécutait pour lui le groupe d'Hercule et Lycas; et en même temps, non-seulement il faisait mille ladreries, mais il les racontait comme des traits d'esprit. Mme Torlonia, la duchesse de Bracciano, avait été admirablement belle; quoiqu'elle ne fût...
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